galerie

v i n c e n z    s a l a

52, rue notre dame de nazareth

75003 paris

C’est la ligne, en tant qu’intention esthétique concrète, qui constitue le point de départ du travail artistique de Cidália Soares et Carsten Sievers. Elle est à la fois matériau et vecteur d’une pratique expérimentale ciblée sur la répétition et la variation. Partant de paramètres simples et clairement définis, les deux artistes développent des systèmes complexes pour une exploration graphique de l’espace et de la profondeur.

Dans ses dessins à l’encre, généralement de petit format, Cidália Soares remplit la surface picturale de lignes minutieusement tracées. Parfois ces lignes forment des rayures, parfois elles produisent des hachures s’entrelaçant en mouvements ondulés. Le tracé des lignes et le choix des couleurs – des tons vifs de jaune, rouge ou turquoise au noir profond en passant par l’ocre et le marron – établissent ainsi un dialogue tout en nuances. Ils s’associent en de délicats traits de couleurs qui évoquent des veinures, ou font apparaître des effets de dégradés comme un scintillement optique. Il émane de ces dessins une mystérieuse luminosité. Cidália Soares les qualifie d’ailleurs de «petites fenêtres ouvertes qui donnent à voir une lumière picturale et appellent à ralentir le regard».

En variant les longueurs, en jouant sur des contrastes de clair et de foncé, les lignes qui se croisent et se superposent créent tantôt des motifs géométriques, tantôt des formes qui s’intercalent ou qui semblent flotter à la surface du papier pour ensuite s’estomper dans la profondeur de la représentation. Certains feuillets présentent comme un treillis et entraînent le regard au-dedans, vers un subtil jeu de lignes. Dans d’autres, des quadrillages imbriqués forment des compositions complexes qui donnent à voir un chatoiement, une oscillation spatiale évoquant parfois des structures architecturales. Le travail en série ouvre sur un vaste champ de permutations, de transformations, de décalages.

Les œuvres de Cidália Soares dotent le vocabulaire formel, géométrique et abstrait, d’un chromatisme expressif qui confère à ces images subtiles une tonalité subjective et émotionnelle. C’est dans une approche ludique qu’apparaissent des références aux systèmes artistiques développés par des artistes comme Günther Förg ou Sol Lewitt. Les nuances de coloris et de densité chromatique – dues au mouvement de la main dans l’application de l’encre sur la feuille – ainsi que des petites variations dans l’exécution viennent perturber le systématisme rationnel des principes de composition formels qui les constituent. Ce mode de travail relève d’une tension qui se manifeste avec brio dans la mise en scène de rapports spatiaux complexes: alternance de clair et de foncé, d’épaisseur et de transparence. Ses dessins nous entrainent dans un voyage vers les profondeurs de l’espace pictural.

Une simple ligne ondulée – telle est la base tant matérielle que conceptuelle des pliages de Carsten Sievers. Dans des variations se renouvelant sans cesse, l’artiste reporte cette forme géométrique élémentaire sur des papiers calque grand format, au graphite et à l’aide d’un gabarit. La feuille pliée permet à la ligne d’entamer un dialogue avec elle-même. Les superpositions et concentrations font apparaître des images complexes, littéralement composites, laissant le dedans et le dehors, le centre et la périphérie, l’espace pictural et la profondeur se redéfinir et se circonscrire à chaque étape du travail.

Le processus consistant à plier et inciser le papier ouvre de multiples perspectives et possibilités d’action, tandis que d’autres s’écartent – l’issue du jeu reste indéterminée. De fait, pour Carsten Sievers, ce travail revient à jouer une partie d’échecs contre lui-même qui finirait, dans le meilleur des cas, en «partie nulle pour tous les éléments concernés»: «Une situation simple et calme, dans laquelle aucun autre mouvement n’est possible, riche de toute cette énergie et tension qui a permis leur émergence», pour reprendre les propos mêmes de l’artiste. Le travail achevé est – et présente – un rapport complexe à soi-même.


La pratique de l’addition et de la répétition, dont Carsten Sievers a résolument fait son principe artistique, se retrouve aussi dans les œuvres du deuxième cycle, objets muraux en plexiglas, ventouses et fil de fer. Pour ces objets, l’artiste a percé des ventouses à intervalles réguliers dans des plaques de plexiglas en couleur. Pour fixer les ventouses sur le mur, il s’est servi d’un fil métallique courbé en formes sérielles. La fixation ainsi rendue visible prend la forme d’un entrelacs sibyllin qui évoque comme une calligraphie.


Par leur manière de décliner un message formel de base, les œuvres de Carsten Sievers renvoient aux éléments d’un minimalisme désormais classique – on pense ici à Brice Marden, Donald Judd ou Eva Hesse –, mais tout en l’interrogeant: que ce soit par le choix des matériaux en apparence rudimentaires, par leur mode de fabrication affiché, ou par le caractère revendiqué des erreurs et impondérables comme éléments constitutifs de la représentation.

                                                                                                                                                                                                           

Cidália Soares

Carsten Sievers

exposition du 9 septembre au 21 octobre 2017

horaires d’ouverture: jeudi à samedi de 14h à 19h

galerie vincenz sala  paris | berlin

paris: 52, rue notre dame de nazareth, 75003 paris, france, tel.: +33 658 933 927 | berlin: sigmaringer str.23, 10713 berlin, deutschland, tel.: +49 179 917 73 94 | directeurs: herman-josef oechtering, helmut bauer

Cidália Soares

Née en 1971 en France

Formation: 1993-1998, École Nationale des Beaux-Arts de Bourges
Vit et travaille à Paris

www.cidaliasoares.com



Carsten Sievers


Né en 1969 en Allemagne

Formation: 1989-1998, Hochschule der Künste, Berlin

Vit et travaille à Berlin

www.eigen-art.com

Astrid Ihle